Loi n°1.533 du 9 décembre 2022 : enquête préliminaire, mesures alternatives aux poursuites, garde à vue, audition libre

19.12.2022

Procédure pénale

Eva GROS


La Loi n° 1.533 du 9 décembre 2022 relative à l’enquête préliminaire et aux mesures alternatives aux poursuites (JDM n° 8621 du 16 décembre 2022) est issue du projet de loi n° 1030 reçu par le Conseil National le 9 avril 2021 et voté lors de la Séance publique du 30 novembre 2022.

Elle modernise l’action pénale en l’adaptant aux évolutions de la société, “en renforçant les outils dont disposent la justice et la police pour poursuivre les infractions” tout “en garantissant “les droits des personnes mises en cause” (Commission de Législation, Rapport sur le projet de loi n° 1030, 28 novembre 2022, p. 1).

La Loi n° 1.533 clarifie et améliore les dispositifs existants du Code de procédure pénale concernant les mesures alternatives aux poursuites, la garde à vue et l’audition libre (apports de la Commission de Législation), et l’enquête préliminaire (la réforme la plus substantielle). Cette réforme a pour origine les travaux de la Commission de mise à jour des Codes[1]

L’entrée en vigueur est fixée selon, au 1er mai 2023 ou au 1er mars 2023. Les dispositions transitoires en précisent les modalités d’application, au cas par cas

En parallèle, a été votée et publiée le même jour, la Loi n° 1.534 du 9 décembre 2022 modifiant certaines dispositions du Code pénal et du Code de procédure pénale relatives à l’instruction et au pourvoi en révision en matière pénale. Dans un souci de « clarté et d’intelligibilité de la loi », le Gouvernement Princier avait préféré scinder la réforme d’ampleur de la procédure pénale en plusieurs projets de loi, « plutôt qu’à envisager un texte massif procédant à maintes réformes ».[2] Les projets de loi n° 1030 et n° 1031 complètent les récentes réformes déjà intervenues en la matière.[3]

Il reste ici à relever que les lois n°1535 et n°1536 du 9 décembre 2022 (votées et publiées le même jour) réforment également le Code pénal et le Code de procédure pénale, en matière d’entraide judiciaire internationale et de saisie et confiscation des instruments de produits du crime.


SYNTHESE : 

Les apports notables de la Loi n° 1.533 sont les suivants :

— Introduction de mesures alternatives aux poursuites dites de “troisième voie” pour les contraventions et délits (orienter l’auteur des faits vers une structure sanitaire, sociale ou professionnelle, médiation pénale, mesures d’éloignement, etc.) ;

— Retouche du régime de la garde à vue (garanties en cas de prolongation, de fouille au corps intégrale) [apport de la Commission de Législation] ;

— Encadrement de l’audition libre (qui permet d’interroger une personne soupçonnée d’avoir commis une infraction sans la mettre en garde à vue) [apport de la Commission de Législation] ;

— Encadrement de l’enquête préliminaire de police judiciaire (premier stade du procès pénal, à distinguer de l’enquête de flagrance) [apport le plus substantiel de la réforme] ;

— Instauration de la procédure générale de complément d’information (qui permet au Tribunal de demander la réalisation d’actes d’enquête supplémentaire avant de statuer).


POUR ALLER PLUS LOIN (présentation détaillée) : 

> Introduction de mesures de « troisième voie » pour les contraventions et les délits (crimes exclus), outre les poursuites et classement sans suite « brut » [nouveaux art. 34-1 à 34-4 CPP] :

Avant cette réforme, le Procureur Général pouvait, soit mettre en mouvement l’action publique en déclenchant des poursuites (en ouvrant une information judiciaire, ou en citant la personne devant la juridiction correctionnelle ou de simple police), soit classer l’affaire sans suite (par décision motivée notifiée à la personne concernée et la victime si elle a été identifiée).

Dans une démarche d’optimisation du corps des dispositions de procédure pénale, le Procureur Général pourra désormais s’agissant (exclusivement) des contraventions et des délits, prononcer 8 types de mesures alternatives préalablement à sa décision sur l’action publique, s’il lui apparaît que l’une d’elles est susceptible d’assurer la réparation du dommage causé à la victime, de mettre fin au trouble résultant de l’infraction ou de contribuer au reclassement de l’auteur des faits :

– 1° En cas de faible préjudice : inscrire le rappel à l’auteur des faits de la règle de droit, de la peine prévue et des risques de sanctions encourues en cas de réitération des faits (en pratique déjà mis en œuvre par le Parquet Général) ;

– 2° Orienter l’auteur des faits vers une structure sanitaire, sociale ou professionnelle, avec production d’une preuve concrète de l’accomplissement de cette démarche à ses frais [consentement de l’intéressé requis], selon :

• traitements ou soins auprès d’une structure sanitaire ou d’un professionnel de santé, notamment une consultation d’un psychiatre ou d’un psychologue ;

• stage ou formation dans un service ou un organisme sanitaire, social ou professionnel : d’éducation civique, de responsabilité parentale, de sensibilisation à la lutte contre l’achat d’actes sexuels, de responsabilisation pour la prévention et la lutte contre les violences au sein du couple et sexistes, de lutte contre le sexisme et de sensibilisation à l’égalité entre les femmes et les hommes, de sensibilisation aux dangers de la consommation d’alcool ou de l’usage de produits stupéfiants, de sensibilisation à la sécurité routière, …

– 3° Demander à l’auteur des faits de régulariser sa situation au regard de la loi ou des règlements [consentement de l’intéressé requis] dans un délai ne pouvant excéder 6 mois maximum (renouvelable pour une même durée en raison d’un motif légitime dûment justifié) et ainsi de faire disparaître, effectivement et rapidement, les conséquences d’une infraction (par ex. se dessaisir au profit de l’État de la chose qui a servi ou était destinée à commettre l’infraction ou qui en était le produit…) ;

– 4° Demander à l’auteur de réparer le dommage en recherchant le désintéressement de la victime [consentement de l’intéressé requis] dans un délai ne pouvant excéder 6 mois maximum (renouvelable pour une même durée en raison d’un motif légitime dûment justifié) (par ex. restitution de l’objet frauduleusement soustrait, remise en état des lieux ou des choses dégradés, dédommagement de nature pécuniaire, excuses à l’adresse de la victime…).

* La Commission de Législation a ajouté les 4 mesures alternatives suivantes, dans la droite ligne de l’Avis du Haut Commissariat à la protection des droits (18/07/2022) qui avait estimé qu’une réflexion devrait s’ouvrir sur l’intérêt qu’il pourrait y avoir à aller vers une justice “restaurative” en examinant le panel extrêmement large d’alternatives existant dans d’autres pays européens au titre desquelles la médiation pénale particulièrement répandue :

– 5° Médiation entre l’auteur des faits et la victime dans un délai ne pouvant excéder 6 mois (renouvelable pour une même durée en raison d’un motif légitime dûment justifié) [à la demande ou avec l’accord de la victime ; consentement de l’intéressé requis].

Cas exclus de la médiation pénale : violences commises envers conjoint,  partenaire d’un contrat de vie commune, cohabitant d’un contrat de cohabitation ou  toute autre personne vivant avec lui sous le même toit ou y ayant vécu durablement (vise à s’assurer que la victime n’accepte pas une mesure de médiation car contrainte par sa situation, ou du fait de l’emprise psychologique que l’auteur des faits pourrait exercer sur elle).

– 6° Mesure d’éloignement [pour une durée maximale de 6 mois, sans renouvellement possible] interdisant à l’auteur des faits de paraître dans un ou plusieurs lieux déterminés dans lesquels l’infraction a été commise ou dans lesquels réside la victime ;

–  7° Interdiction de rencontrer [pour une durée maximale de 6 mois, sans renouvellement possible] ou d’entrer en relation avec la ou les victimes par quelque moyen que ce soit y compris les communications électroniques.

– 8° Interdiction de rencontrer [pour une durée maximale de six mois, sans renouvellement possible]  ou d’entrer en relation avec le ou les coauteurs ou complices éventuels ou toute personne qui aura incité ou provoqué à la commission de l’infraction désignés par le Procureur Général par quelque
moyen que ce soit y compris les communications électroniques.

La suspension de la prescription de l’action publique est limitée à la durée de la mesure.

Une adaptation de ces mesures alternatives de poursuite est prévue pour les mineurs de 13 ans ou plus (convocation des représentants légaux du mineur et consignation de leur accord selon la mesure ; justifier de l’assiduité à un enseignement ou une formation professionnelle ; interdiction de sortir du domicile à des horaires déterminés sauf cas dérogatoires ; mesure de réparation à l’égard de la victime ou dans l’intérêt de la collectivité).

Sont enfin fixées les formalités qui devront être respectées lors du recours à ces mesures alternatives (rédaction d’un procès-verbal contresigné par l’auteur des faits, consignation du consentement, notification à la personne concernée).

* Les adjonctions suivantes, relatives à la garde à vue et à l’audition libre ont été opérées par la Commission de Législation :

> Modernisation du régime de la garde à vue [modification des art. 60-9 bis, 60-4, 60-9 CPP] :

– Inscription du principe selon lequel la personne gardée à vue est informée de son droit d’être assistée d’un avocat dès le début de la garde à vue.

– Précision qu’en cas de prolongation de la garde à vue, la personne doit être informée à nouveau de son droit à s’entretenir avec un avocat, dès sa notification.  Afin de ne pas bloquer la procédure, les règles suivantes sont applicables : si l’avocat ne se présente pas dans un délai d’1 heure après avoir été avisé, l’officier de police judiciaire pourra décider de débuter l’audition. Si l’avocat se présente après l’expiration de ce délai, alors qu’une audition est en cours, celle-ci sera interrompue à la demande de la personne gardée à vue afin de lui permettre de s’entretenir avec son avocat.

 – Renforcement de l’encadrement de la fouille au corps intégrale susceptible de déboucher sur la mise à nu de la personne :

les officiers de police judiciaire doivent indiquer dans le procès-verbal les motifs d’une telle mesure, sous peine de nullité de la mesure et
des éventuelles saisies réalisées à cette occasion ;

• concernant les mineurs, cette fouille ne pourra être décidée que par le Procureur Général ou le juge d’instruction (protection supplémentaire au regard de l’impact psychologique d’une telle mesure, afin d’évaluer sa proportionnalité par rapport aux motifs de la garde à vue).

> Consécration de la pratique de l’audition libre [nouvel art. 60-16] :

L’audition libre (souvent utilisée en matière d’infractions routières par exemple) est dotée d’un cadre précis :

Information préalable de la personne à l’égard de laquelle il existe des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction de ses droits, dont le droit à l’assistance d’un avocat dans les conditions identiques à celles
prévues pour la garde à vue, et le droit de quitter les locaux de police à tout moment.

– L’audition libre n’est possible que pour les mineurs de plus de 10 ans avec l’assistance obligatoire d’un avocat et postérieurement à l’information de ses représentants légaux.

> Consécration expresse de l’enquête préliminaire applicable aux contraventions, délits et crimes [22 nouveaux articles : art. 81-1 à 81-13 avec des sous-numérotations], la réforme la plus substantielle

Pour mémoire, l’enquête préliminaire permet au Ministère Public d’être informé sur la réalité et la consistance des indices de soupçon ou de commission d’une infraction, en diligentant tout acte d’enquête non coercitif (sans préjudice d’actes coercitifs auxquels la personne concernée aurait consenti par écrit) lui permettant de rechercher les infractions délictuelles ou criminelles, afin de prendre la décision qu’il convient sur les suites à donner.

Avant cette réforme, l’enquête préliminaire était seulement implicite dans le Code de procédure pénale[4].

Dans la droite ligne de la jurisprudence de la Cour d’appel, elle est dorénavant consacrée expressément, en fixant le cadre de son utilisation, ses objectifs, son contenu et ses limites :

Hypothèses de déclenchement de l’enquête préliminaire : à la suite d’une plainte, d’une dénonciation, d’un renseignement ou d’un constat porté à la connaissance d’un officier de police judiciaire ou du Procureur Général relatif à la commission ou à la tentative de commission d’une infraction, hors crime ou délit flagrant (précisions) ; pour permettre de parvenir à la découverte d’un indice laissant présumer la flagrance (ajout) ;

– Instauration d’un mécanisme de transition entre une enquête préliminaire et une information judiciaire (dans l’éventualité où un officier de police judiciaire aurait débuté une enquête sans avoir connaissance qu’une information judiciaire est en cours). Dès que la concomitance des deux procédures est constatée, l’enquête préliminaire doit être clôturée et le dossier transmis au Procureur Général.

Définition des actions de police judiciaire : pouvoirs propres des officiers de police judiciaire pour agir d’office dans ce cadre ou sur instruction du Procureur Général, et aussi des agents de police judiciaire placés sous le contrôle desdits officiers ;

Rôle du Procureur Général dans le cadre de l’enquête préliminaire : bénéficie d’une information de nature à lui permettre d’en contrôler l’exécution, son effectivité, de la surveiller, mais aussi de garantir la protection de la société et les droits des mis en cause, victimes et toute personne concernée.

– Encadrement des modalités dans lesquelles l’officier de police judiciaire peut débuter d’office une enquête préliminaire.

Durée de l’enquête préliminaire : délai fixe pour toutes les infractions de 2 ans maximum à compter du premier acte d’enquête, y compris si celui-ci est intervenu dans le cadre d’une enquête de flagrance, pouvant être prorogé une fois pour une durée maximale d’1 an à l’expiration du délai initial, sur autorisation écrite et motivée du Procureur Général versée au dossier de la procédure. Tout acte d’enquête intervenant après l’expiration de ces délais est nul.

*Des retouches relatives à la durée ont été opérées par la Commission de Législation dans la droite ligne de l’Avis du Haut Commissariat à la protection des droits (18/07/2022) qui avait estimé que la durée devrait être applicable à l’ensemble des enquêtes préliminaires, que les prorogations motivées devraient être également encadrées dans une durée, et que le point de départ du délai devrait être précisé avec exactitude.

–  Suites qui doivent être données à l’échéance des délais dans lesquels l’enquête préliminaire peut être réalisée, dont sont informées les victimes et les personnes ayant fait l’objet d’actes d’enquête :

• classement sans suite de l’affaire ;

• prononcé de mesures alternatives aux poursuites ;

• ouverture d’une information judiciaire ;

• renvoi devant une juridiction de jugement.

Définition des actes d’enquête préliminaire et de leurs effets sur la prescription ;

Demandes de nullité des actes réalisés dans le cadre de l’enquête préliminaire :

Possibilité pour la personne mise en cause qui est renvoyée devant une juridiction de jugement de solliciter la nullité. Dans ce cas, ladite juridiction pourra annuler les actes d’enquête entachés de nullité ainsi que tous les actes subséquents.

• Lorsqu’une enquête préliminaire donne lieu à l’ouverture d’une information judiciaire, les demandes de nullité devront être effectués dans les conditions prévues aux articles 209 à 212 CPP relatifs aux nullités de l’instruction.

– Pouvoir de l’officier de police judiciaire dans le cadre d’une enquête préliminaire de se transporter sur les lieux de l’enquête, avec le principe d’une autorisation préalable du Procureur Général pour pouvoir procéder à une visite domiciliaire (voir infra) dont mention de cette formalité doit être portée au procès-verbal.

– Recours à des personnes qualifiées pour avis technique ou scientifique : à l’initiative du Procureur Général, ou de l’officier de police judiciaire sous l’autorisation préalable du Procureur Général.

Transposition des règles existantes relatives aux perquisitions dans le titre dédié à l’instruction, en les adaptant, en tant que visites domiciliaires, aux spécificités de l’enquête préliminaire, tout en conservant les protections établies pour les perquisitions :

• Réquisitions de toute personne, organisme public ou privé qui sont susceptibles de détenir des informations ou documents utiles à la manifestation de la vérité. Les réquisitions portant sur des données techniques permettant d’identifier la source de la connexion ou celles relatives aux équipements terminaux utilisés ou sur les données de trafic et de localisation ne sont possibles que dans 4 cas précis. 

La Commission de législation a tenu compte de la jurisprudence française pour faire évoluer l’encadrement des réquisitions et protéger les droits des personnes visées (du fait que le texte français – dont s’inspirait le nouvel article 81-66-1 dans sa rédaction d’avril 2021 – a fait l’objet d’une censure du Conseil constitutionnel le 3 décembre 2021) : précision qu’il n’est possible de requérir que les documents “utiles à la manifestation de la vérité”, et non plus tous les documents “intéressant l’enquête” ; insertion de 4 cas limitatifs dans lesquels les réquisitions portant sur des données techniques particulièrement intrusives sont possibles.

• Objet de la visite domiciliaire : uniquement la recherche et la constatation de l’infraction ou l’identification de son auteur ou de ses complices y compris en procédant à des opérations de fouille des lieux visités. Le fait que cette visite révèle une infraction ou un auteur ou des complices autres que ceux visés dans l’autorisation de procéder à la visite domiciliaire, ne constitue pas une cause de nullité des procédures incidentes. 

• Droit des personnes :

→ assentiment exprès de la personne, sauf dérogation si les nécessités de l’enquête relative à un crime ou à un délit puni d’une peine d’emprisonnement d’une durée supérieure à trois ans l’exigent.

→ protection supplémentaire dont bénéficient certains lieux en raison de leur destination professionnelle et des secrets devant être protégés par les professionnels qui les occupent (locaux d’une entreprise de presse, cabinet et domicile d’avocat, étude ou domicile d’un notaire ou huissier, cabinet ou domicile d’un médecin, locaux d’une juridiction ou domicile d’une personne exerçant des fonctions juridictionnelles, bureau ou domicile des personnes occupant une fonction gouvernementale etc.). Il est à noter que les experts-comptables et comptables agréés ne sont pas mentionnés car ceux-ci ne peuvent opposer le secret professionnel que “dans le cas d’information ouverte” ou “de poursuites engagées ou d’actions disciplinaires intentées devant le conseil de l’Ordre (art. 29 de la Loi n° 1.231 du 12 juillet 2000).

• Restriction horaire (6h-21h) avec des exceptions :

→ possible de nuit en cas de réclamation faite de l’intérieur d’un lieu normalement clos, afin de permettre aux forces de police d’intervenir par exemple en cas de violences intrafamiliales dans un domicile, sans qu’une infraction flagrante soit caractérisée ;

→ inapplicable pour certains crimes relatifs à la sûreté extérieure et intérieure, au complot contre le Souverain et Sa famille, au viol ou à la séquestration.

• Régime des saisies de documents, données informatiques, papiers ou autres objets dans une perspective probatoire.

Hormis l’instrument ou le corps de l’infraction, le Procureur Général ne maintient que la saisie des objets, documents et données informatiques utilises à la manifestation de la vérité et uniquement pour la durée strictement nécessaire aux investigations.

→ Le Procureur Général peut également maintenir la saisie des biens susceptibles de confiscation en vertu de l’article 12 CP.

→ Le Juges des libertés, à la requête du Procureur Général, se prononce par ordonnance motivée dans un délai de 10 jours à compter de la réalisation de la saisie, à peine de nullité, sur le maintien de la saisie (dans ce cas, restitution immédiate et destruction du procès-verbal des opérations) ou sur sa mainlevée (dans ce cas, versement du scellé et du procès-verbal à la procédure, sans préjudice d’une éventuelle demande ultérieure de nullité de la saisie). Le cas échéant, il autorise la remise des copies des objets, documents et données informatiques nécessaires aux besoins de la vie courante ou aux activités professionnelles des intéressés. Ladite ordonnance pourra être déférée à la Chambre du Conseil de la Cour d’appel sur simple requête, dans un délai de 15 jours à compter de sa notification (appel non suspensif).

→ Dispositions régissant la gestion, l’alinéation ou la destruction des biens susceptibles de confiscation (dans le respect des droits des tiers).

→ Régime des saisies qui peuvent être effectuées au sein des lieux protégés (en raison de leur destination et du secret professionnel, voir supra).

Certains des amendements opérés par la Commission de législation en matière de visite domiciliaire s’inscrivent dans le prolongement de l’Avis du Haut Commissariat à la protection des droits (18/07/2022) sur le texte initial, selon lequel :

• Il faudrait compléter les dispositions projetées pour s’assurer que le consentement de la personne objet d’une visite domiciliaire est bien valide, en précisant les contours de la déclaration écrite d’assentiment (par exemple, mention de la bonne délivrance préalable d’une information claire par le policier sur l’objet de la visite et de la possibilité pour le particulier de la refuser) ;

La nécessité de ménager un juste équilibre entre les pouvoirs attribués aux officiers de police judiciaire en matière de visite domiciliaire en enquête préliminaire et le principe constitutionnel d’inviolabilité du domicile, implique de déterminer plus précisément les conditions dans lesquelles il peut être dérogé à l’assentiment de la personne (gravité des infractions concernées et contours de ce qui peut être recherché) ;

• S‘agissant de la protection des secrets professionnels des professions réglementées dans le cadre des visites domiciliaires, la disposition générale devrait être réécrite pour viser explicitement les droits fondamentaux devant être protégés, d’autant que les professions visées (hormis les avocats et Conseillers Nationaux) ne bénéficient d’aucune garantie spécifique – Des dispositions complémentaires devraient être prises pour mieux encadrer les visites domiciliaires notamment dans les locaux des journalistes afin de préserver le secret des sources et la liberté d’expression.

• Il faudrait s’interroger sur les formalités substantielles à respecter dans le cadre des actes menés en enquête préliminaire et inscrire les cas de nullité dans le texte.

– Régime des fouilles sur les personnes (les fouilles à corps intégrales ou investigations corporelles internes ne peuvent être relaissés que dans le cadre d’une mesure de garde à vue), fouilles des véhicules, inspection des bagages, fouilles des navires ;

Aménagement de la comparution des personnes convoquées par l’officier de police judiciaire  pour les nécessités de l’enquête ; 

– Suppression des mesures de géolocalisation en temps réel ou d’interception des communications, donc l’introduction était initialement projetée en matière d’enquête préliminaire. La Commission de Législation a en effet estimé que ces deux méthodes seraient disproportionnées à cette phase de la procédure (qui se déroule en dehors de la mise en examen de la personne mise en cause et du contrôle du juge d’instruction) et considéré que cette insertion devrait faire l’objet d’une réflexion postérieure et approfondie.

– Régime des contrôles d’identités dans le cadre d’une enquête préliminaire ; Interpellation d’une personne recherchée pour crime ou délit non flagrants résultant d’un contrôle d’identité effectué par les agents de police judiciaire ;

– Possibilité alternative pour l’officier de police judiciaire de placer une personne en garde à vue ou de procéder à l’audition libre ; 

– Organisation des situations dans lesquelles le Procureur Général peut ou doit mettre une copie du dossier de la procédure à la disposition de la victime ou des mis en cause. Remanié par la Commission de Législation afin de renforcer la transparence de l’enquête préliminaire et le contradictoire (comme la possibilité de formuler des observations) ;

– Organisation de la durée des saisies, fixée à 1 an, renouvelable pour une même durée avant l’expiration de ce délai.

Droits de la personne concernée par l’enquête préliminaire, droits de la victime et, le cas échéant, de tiers vis-à-vis d’objets placés sous la main de la justice.

> Instauration de la procédure de complément d’information applicable à l’ensemble des procédures (qui permet au Tribunal de demander la réalisation d’actes d’enquête supplémentaire avant de statuer) [nouvel art. 396-1 CPP] :

A l’origine, le Gouvernement avait projeté que la procédure de complément d’information ne s’applique qu’à la comparution immédiate, ce qui a été élargi à l’ensemble des procédures par la Commission de Législation.

 


[1] La Commission de mise à jour des Codes, approuvée par Décision Souveraine du 26 mai 1954, a été instituée sur proposition du Directeur des Services Judiciaires. Elle est composée de magistrats, de représentants de l’Ordre des avocats, du Conseil National et du Gouvernement, ainsi que de Professeurs agrégés des facultés de droit.

[2] Exposé des motifs du projet de loi n° 1031, 2021-3, 15 mars 2021, p. 3.

[3] Par exemple : Loi n° 1.343 du 26 décembre 2007, dite « justice et liberté », portant modification de certaines dispositions du Code de procédure pénale, ayant principalement refondu les mesures de sûreté (contrôle judiciaire, détention provisoire) et établi le régime juridique des écoutes téléphoniques, savoir la saisie, l’interception, l’enregistrement et la transcription des correspondances émises par voie de communication électronique ; Loi n° 1.394 du 9 octobre 2012 portant réforme des Codes pénal et de procédure pénale en matière de corruption et de techniques spéciales d’enquête, ayant introduit des techniques dites d’enquête pénale proactive telles que la sonorisation et la fixation d’images de certains lieux ou véhicules, l’enquête discrète ainsi que le témoignage anonyme ; Loi n° 1.462 du 28 juin 2018 renforçant le dispositif de lutte contre le blanchiment de capitaux, le financement du terrorisme et la corruption, instaurant la co-saisine d’instruction et formalisant les règles de communication des commissions rogatoires internationales et de ses pièces d’exécution (voir notre publication : > https://gbmlf.miam.dev/panorama-legislatif-2018/)

[4] Article 34 du Code de procédure pénale.


Publication liée :

https://gbmlf.miam.dev/projet-de-loi-n-1031-vote-temoin-assiste-instruction-pourvoi-en-revision-en-matiere-penale-infractions-commises-par-les-personnes-morales/

 
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