Projet de loi n° 1045 portant reconnaissance et régime de la propriété des œuvres de l’esprit

Monaco • Propriété littéraire et artistique • Droits d’auteur • Droits voisins • Artistes interprètes • Phonogramme • Vidéogramme • Communication audiovisuelle • Logiciel • Organisme de gestion et de répartition des droits • Sociétés d’auteur • Autorisation administrative • Contrefaçon

Le projet de loi n° 1045 portant reconnaissance et régime de la propriété des œuvres de l’esprit (104 articles), déposé en Séance publique du 14 septembre 2021 et renvoyé devant la Commission Culture et Patrimoine, abrogerait et remplacerait la Loi n° 491 du 24 novembre 1948 sur la protection des œuvres littéraires et artistiques, modifiée. Il s’inspire pour partie de la législation de l’Union Européenne en la matière.

Il est à noter que parallèlement à cette réforme d’ampleur, a été déposé au Conseil national le projet de loi n° 1044 relative au droit de suite. En savoir plus ici

S’agissant du droit de l’auteur sur l’œuvre de l’esprit (défini quel que soit le type d’œuvre -littéraire, artistique, scientifique, pédagogique ou autre – comme “toute création originale voulue et conçue par son auteur pourvu qu’elle s’exprime par sa réalisation, même inachevée, alors même qu’elle n’a pas été divulguée”), le projet de loi le qualifie de droit de propriété, dont il décline ensuite les attributs.

Le texte projeté garantit également la protection du titre d’une œuvre de l’esprit (même si cette dernière n’est plus protégée) dès lors que son utilisation peut entraîner un risque de confusion. La disposition projetée accorde une protection plus large que celle prévue à l’article L. 112-4 du Code de la Propriété Intellectuelle français qui pose comme condition supplémentaire pour pouvoir bénéficier de la protection, que le titre soit utilisé pour individualiser une œuvre du même genre.  

Il distingue également les droits de propriété intellectuelle (incorporelle) attachés à l’œuvre, des droits de propriété (corporelle) du support matériel de l’œuvre (protégés par l’article 438 du Code civil qui dispose que “La propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements”.)

Le dispositif porte aussi consécration de l’existence légale des droits voisins qui ont pour objectif de protéger la contribution artistique ou financière investie dans la création. Il s’agit “de garantir aux artistes interprètes de pouvoir tirer profit de leurs prestations et d’assurer aux producteurs de phonogrammes, de vidéogrammes et aux entreprises de communication audiovisuelle, un juste retour sur investissement” (Exposé des motifs du projet de loi n° 1045, p. 5).

En ce qui concerne le mode d’exploitation des droits d’auteur et des droits voisins, le texte régirait outre leur gestion individuelle par contrat, leur gestion collective par des sociétés d’auteur (nommés “Organismes de gestion et de répartition des droits”, qui délivrent les autorisations d’exploitation des droits, perçoivent et répartissent les rémunérations dues). Il soumettrait l’activité des sociétés d’auteur étrangères à Monaco à une autorisation administrative préalable. Celles-ci devraient par ailleurs être représentées à Monaco par une personne physique ou morale, elle-même dûment autorisée.

Le projet de loi envisage par ailleurs la création d’une Association en charge de contribuer au rayonnement culturel de la Principauté (que les sociétés d’auteur ayant leur siège à l’étranger pourraient charger de leur représentation à Monaco), à laquelle tout organisme de gestion collective des droits autorisé à Monaco devrait affecter une partie de la rémunération acquise à Monaco. Celle-ci rendrait naturellement compte de l’utilisation des fonds (contrôle comptable et rapport annuel au Ministre d’Etat). 

La Commission des droits d’auteur et des droits voisins qui serait instituée auprès du Ministre d’Etat, aurait notamment compétence pour examiner les demandes d’agrément et d’autorisation des activités des organismes de gestion et de répartition des droits, et de contrôler l’activité de l’Association en charge de contribuer a rayonnement culturel de la Principauté.

Le projet de loi régit également la communication au public d’une œuvre ou d’un programme par satellite ou retransmission par câble.

Le dispositif de sanctions existant serait enfin complété (saisie contrefaçon directement inspirée de la Directive 2004/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle et sanctions pénales)

 

Dispositif du projet de loi n° 1045 :

Droits d’auteur (Livre I) : droit moral (transmission; divulgation de l’œuvre; propriétaire de l’objet qui constitue le support matériel de l’œuvre), droits d’exploitation (droit de l’auteur ; institutions publiques ou chargées d’une mission d’intérêt général ; reproduction; représentation par la communication au public; réalisation en exécution d’un contrat de travail; réalisation en qualité de fonctionnaire ou d’agent de l’Etat ; droit de divulgation ; cas des logiciels ; cession d’une œuvre originale manuscrite, graphique ou plastique et droit d’y accéder, droit de suite ; droits après le décès de l’auteur ; exceptions à l’exercice des droits d’auteur), modalités d’exploitation de l’œuvre (contrats d’exploitation, contrat d’édition, contrat de représentation, contrat de production audiovisuelle, contrat de commande à des fins publicitaires).

Droits voisins (Livre II) : droit moral (sur la prestation), droits patrimoniaux (fixation de la prestation par voie de phonogramme ou de vidéogramme ; reproduction et communication au public ; contrat souscrit par un artiste-interprète ou un exécutant et un producteur en vue de la réalisation d’une œuvre audiovisuelle ; cession des droits sur la prestation ; rémunération de l’artiste-interprète ou de l’exécutant ; phonogramme publié à des fins de commerce ; reproduction ou mise à la disposition du public par la vente, l’échange, le louage ou communication au public du vidéogramme; durée des droits patrimoniaux des artistes interprètes ou exécutants, des producteurs de phonogramme, des producteurs de vidéogrammes, des entreprises de communication audiovisuelle).

—Communication au public par satellite et la retransmission de programmes (Livre III) ;

—Organismes de gestion et de répartition des droits (Livre IV) ;

—Commission des droits d’auteur et des droits voisins (Livre V) ;

—Sanctions (Livre VI) :

—Dispositions finales (Livre VII).

 

Principaux instruments internationaux auxquels la Principauté de Monaco est partie :

—Convention universelle sur le droit d’auteur et les protocoles signés à Genève le 6 septembre 1952 (Ordonnance Souveraine n° 1.191 du 12 septembre 1955).

—Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques du 9 septembre 1886, telle que révisée à Paris le 24 juillet 1971, rendue exécutoire (Ordonnance Souveraine n° 5.501 du 9 janvier 1975).

—Convention internationale sur la protection des artistes interprètes ou exécutants, des producteurs de phonogrammes et des organismes de radiodiffusion, faite à Rome le 26 octobre 1961 (Ordonnance Souveraine n° 8.488 du 26 décembre 1985).

 

Législation européenne de référence :

Directive n° 91/250 du Conseil du 14 mai 1991 concernant la protection juridique des programmes d’ordinateur et Directive 2009/24/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 concernant la protection juridique des programmes d’ordinateur 

Directive 2001/84/CE du Parlement européen et du Conseil du 27 septembre 2001 relative au droit de suite au profit de l’auteur d’une
œuvre d’art originale

Directive 93/98/CEE du Conseil du 29 octobre 1993 relative à l’harmonisation de la durée de protection du droit d’auteur et de certains droits voisins

Directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2001 sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information

Directive 2006/115/CE du 12 décembre 2006 relative au droit de location et de prêt et à certains droits voisins du droit d’auteur dans le domaine de la propriété intellectuelle

Directive 93/83/CEE du Conseil du 27 septembre 1993 relative à la coordination de certaines règles du droit d’auteur et des droits voisins du droit d’auteur applicables à la radiodiffusion par satellite et à la retransmission par câble modifiée par la Directive (UE) 2019/789 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 établissant des règles sur l’exercice du droit d’auteur et des droits voisins applicables à certaines transmissions en ligne d’organismes de radiodiffusion et retransmissions de programmes de télévision et de radio

Directive 2004/48/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle

 

Notre publication liée :

Réforme du droit de suite des auteurs d’œuvres originales manuscrites, graphiques et plastiques

 

 
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